Suite à un voyage au centre de Vassivière au début de l’année, où nous avons pu aller à la rencontre de nombreux acteurs de notre consommation de nourriture, il nous a été proposé de réaliser un repas pour la maison Taittinger, à Pierry. Les personnes rencontrées (agriculteurs, maraîchers, artistes, porcelainiers…) avaient toutes un point en commun : La Terre. Que ce soit la terre organique (celle que l’on consomme) ou la terre minérale, celle que l’on façonne. En collaboration avec Vincent Terranova, et Perrine Bettin, nous avons décidé de créer un repas ayant pour thème Terres en commun. C’est un repas, réalisé sur le domaine Taittinger à Pierry, durant lequel nous avons permis à des philosophes, oenologues, artisans, producteurs, scientifiques, journalistes… de pouvoir débattre sur les différents enjeux que nous avons mis en avant durant les différents temps du repas. Durant le repas, un carnet était proposé à nos convives. Dans ce carnet, différentes questions auxquelles il était proposé de répondre à l’écrit, afin de pouvoir garder une trace, et de pouvoir réaliser différentes analyses et conclusions sur ce repas. (travail en cours, le repas a eu lieu les 13 et 14 mai 2019).
Carottage : Il s’agit de présenter la terre sous sa forme la plus brute. Lors de ce moment d’accueil, nous vous invitons à observer la composition des sols à travers un prélèvement. Il est question de comprendre l’importance de chaque strate, son influence, et ses particularités. Différents états et qualités de terres brutes existent. Trois terres alimentaires ont été proposées : Une terre d'olives noires, graines de courges et fromage affiné Une terre de lentilles, graines de sarrasin et sucre Une terre de betterave, gari, et grué de cacao
Ici, nous laissons la nature s’exprimer. Ce deuxième temps de dégustation représente une prise d’empreinte du territoire, la première forme qu’on emprunte/empreinte à la nature. L’empreinte représente une forme d’aléatoire dans la façon de donner forme. C’est un moyen d’expression brute. Le foyer exprime la force de la nature et son énergie. Nous rendons perceptible et accessible cet échange d’énergie qui s’opère dans les sols et dans les étapes de transformations. Une entrée est proposée, avec un sablé aux algues, du sandre cuit sur pierre, et un nuage de fumet.
Nous exprimons le passage d’un état brut de la matière à une première transformation au travers de 3 exemples de rythmes. Il s’agit de mettre en avant la notion du temps, des saisons, ou encore de la temporalité propre à la restauration d’un écosystème (c’est à dire mettre en place un système de retenue du sol).
La viande Ici le matériau étudié est la viande. C’est pour ça que nous vous proposons trois préparations de viande mettant en avant différentes parties et différents temps de cuisson. La viande impose son rythme selon les temps de cuisson et sa maturation.
Trois beurres sont proposés : Un au zestes de citrons verts, un au paprika fumé, et un aux cèpes. Ces trois beurres proposent un transfert de saveurs qui opère avec le temps, ils sont l’objet d’un assemblage qui dévoile de nouvelles caractéristiques organoleptiques
Les parcelles et son couvert végétal Maintenant nous allons nous intéresser à ce qu’il se trouve au centre de la table. Nous observons le découpage du territoire qui est aussi bien commun. Nous vous invitons donc à amener ces parcelles à vous, tout en essayant de garder la cohésion du territoire. Nous pouvons l’agrandir tout en gardant son aspect formel. C’est un accompagnement à la viande, composé d’une duxelles de champignon, de persil et de cerfeuils.
C’est une expérience inspirée par la rencontre avec un herboriste . Suite à cette rencontre, nous avons pris conscience des prélèvements raisonnés, du respect de l ’environnement, du soin appor té à chaque plante quand il récolte et qu’il les prépare Deux bols, disposés au côté des autres éléments, mettent en avant la préciosité, la précision, et l’exigence du travail des femmes et des hommes. Nous utilisons le végétal comme ornementation (nous en faisons un émaillage comestible), à travers un geste poétique, qui se fixe à un moment, puis qui vient se fondre au contact du liquide.
Ce dessert composé de deux parties évoque une symbiose possible entre l’humain et l’environnement. Le dessert propose la cristallisation comme moyen de valoriser ce qu’on pourrait considérer comme un rebut et d’un autre côté met en avant un matériau modifiable et recyclable à l’infini, ici aucun rebut. Ce sont deux pistes qui montrent comment être dans une relation de soin et de respect avec la terre.
Publication du projet dans le magazine Process